Je quitte Tokyo ce soir, je laisse mon appartement et il me restera comme ça un peu d'argent pour quelques étapes au Japon puis en Chine...puis au Japon si tout se passe bien !
Je quitte Tokyo ce soir, je laisse mon appartement et il me restera comme ça un peu d'argent pour quelques étapes au Japon puis en Chine...puis au Japon si tout se passe bien !
Il est assez difficile de rencontrer des gens normaux parmi ceux qui viennent passer quelques années au Japon, tous ont un hobby curieux allant de l'entomologie provençale aux mangas en passant par la taille des jupes des japonaises. Mais nous avons tous en commun (avec une bonne partie du reste de la Terre certes) d'avoir vu plus de six fois lost in translation. Je ne me suis souvenu du nom de l'hôtel que récemment en me baladant dans un quartier de Tokyo, le Park Hyatt. Je n'ai eu que peu d'occasions de voir Tokyo d'assez haut depuis que je suis arrivé (ma chambre ne dépassant pas le deuxième étage quelque soit l'endroit où j'enménage) et bien que l'ascenceur du Metropolitan Government Building s'élève jusqu'au 45ème étage gratuitement, qu'on puisse y voir un hélicoptère quitter le sommet d'une tour pour s'élever sans un bruit au dessus d'une mer d'autres tours sur laquelle flotte des constellations diodées de rouges et de blancs ; bien que tout ça, la frustration restait et je sentais au fond de moi qu'il y avait quelque chose comme le souvenir enfoui d'un moment de paix gagnant peu à peu la lumière tamisée d'un bar d'altitude.
Malheureusement, comme toute thérapie, le prix à payer fut à la hauteur. Dès le 13ème étage, les couloirs se couvraient de moquette et de miroirs, c'était très grand, on pouvait se perdre, et en atteignant l'étage 52, en baissant un peu la tête mes souvenirs de l'Assomoir n'ont pas eu de mal à ressurgir... Ce drôle de malaise, ces hôtesses qui semblaient nous attendre à la sortie de l'ascenceur, la lumière tamisée et les chemises distinguées, on est entré à pas lents et, fichtre ! il ne faisait pas chaud ; la salle aurait fait une fameuse cave. Et, lentement, les couples avançaient, le menton levé, les paupières battantes, entre les colosses de pierre, les dieux de marbre noir muets dans leur raideur hiératique, les bêtes monstrueuses, moitié chattes et moitié femmes, avec des figures de mortes, le nez aminci, les lèvres gonflées. Ils trouvaient tout ça très vilain (notamment les immenses tableaux aplats de couleurs façon mosaïque fluorescente).
L'incompréhension s'est installée, provoquée de part et d'autre et puis nous nous sommes séparés bon amis. Elena visiblement ne ressentait rien de tout ça et un serveur est venu lui demander gentiment de poser sur une chaise et non sur la table le sac plastique contenant ses nouvelles bottes en caoutchouc. Le bar ne proposait pas de Santori alors on a tout de même eu l'impression de se faire rouler. Le serveur s'approche et sur son costume impeccable je m'aperçois du regard vicieux qu'il me glisse. Il vient pour prendre la commande, aucun de nous ne se dégonfle et je commande un whisky, ce qui provoque chez l'interlocuteur une courte question, néanmoins incompréhensible. Mon premier whisky en terrasse et comme la petite phrase qui revient malgré soi ("straight or on rocks ?") s'obstinait à ne me montrer que des chutes terribles s'abbatant sur le lit caillouteux d'un torrent en aval, il m'a fallu quelques secondes pour avoir le bon sens de répondre au hasard.
Nous ne descendions pas, du haut de la terrasse noir, tamisée, les yeux plongés dans la mer de gaz, nos pensées se laissaient torturées par l'arrivée prochaine de la note (oui les prix figuraient sur la carte). Or, je n'y avais pas pensé en entrant, mais il est tout à fait possible que la probabilité d'un miracle augmente en s'approchant du ciel et paf, ces idiots nous ont pris pour des résidents de l'hôtel ! Nous avons donc discrètement échappé aux lourdes charges de tables (une vingtaine d'euros, potentiellement par personne) et payé notre verre avant de décamper. Ce bon vieux Bob avait donc raison : "a relaxing time !"
"You get a shiver in the dark / it's raining in the park but meantime / South of the river you stop and hold everything"
Je cherchais des cadeaux de noël par une fraîche soirée de février et je me suis retrouvé une nouvelle fois à Harajuku, le quartier réputé pour être à la pointe de la mode, au coeur de Tokyo. Le nom n'est plus utilisé dans les adresses des résidents depuis un demi-siècle (l'arrondissement dans lequel il est inclus, Shibuya, sert de référent administratif) et ne fait référence qu'à un vague espace qui rayonne depuis un croisement de rue (entre la grande Meiji Road qui descend Tokyo du Nord au Sud, et Omotesando Street), s'attache à quelques bâtiments célèbres et ressasse chaque dimanche les mêmes jeunes un peu déjantés (pour accéder à la carte-sommaire). Comme il arrive trop souvent, je n'ai pas trouvé un seul cadeau mais quelques tee-shirts dessinés pour Uniqlo par quelques types célèbres. La marque a construit ce bâtiment en 2007 pour y loger un magasin de 3 étages imitant le vide d'un self-service et portant un nom tout aussi simple : UT (pour uniqlo Tee-shirt) Uniqlo Store. Il y a donc surtout des tee shirts à l'intérieur : personnages de manga et caleçons au premier étage, femmes au deuxième puis hommes tout en haut. Pendent sur un présentoir des tee shirts de couleurs différentes, couvert recto-(verso) d'un motif allant de Mickey à Joy division en passant par deux droites parallèles. Après la première déception d'arriver si tard à la fin des soldes et de ne trouver que du S et du LL, je me suis aperçu qu'une jeune fille aux allures de vendeuse promenait un court rayon rouge fluo le long d'étagères pleines de tubes en plastiques ressemblant à ceux dans lesquels on stock habituellement des balles de tennis. Je me suis approché pour savoir s'il n'y avait pas d'autres tailles, il y avait un code sur mon tee shirt, elle m'a guidé jusqu'à l'étagère correspondante, a poussé deux ou trois tubes et mon tee shirt Kodak, taille M est apparu, tel un spermatozoïde dans une pillule. Une banque du coton-design qui met en contact des acheteurs individualistes et des designers indépendants.
Mais Harajuku n'est pas exactement le terrain de jeu des innovateurs en tout genre ou plutôt, il l'a toujours été et la forme des institutions qui supportent cette tendance depuis le milieu du siècle transparait au travers de quelques bâtiments. L'occupation américaine de 1945 à 1952 a laissé près du parc de Yoyogi un centre de logement pour les bureaucrates américains (Washington Heights), transformé au moment des Jeux de 1964 (voir le film-docmentaire de Kon IchiKawa réalisé en 1965 : Tokyo Olympiad) en village Olympique et maintenant en un centre de formation et d'éducation sportif. Sur l'ensemble du quartier, les articles de journaux peuvent lire l'évolution de l'économie à partir de ces racines occidentales.
Les magasins de mode touchent le grand Kiddy Land, le magasin de jeux le plus populaire construit en 1950 et actuellement en rénovation, sur cette frontière vague naît une jeunesse freaky qui change de forme plusieurs fois en une quarantaine d'années. Des groupes de jeunes, filles pour la plupart, portent le nom de Takenoko-Zoku (竹の子族 : la tribu des enfants du bamboo...) et dansent dans des costumes de couleurs claires pendant une dizaine d'années. Puis à partir du milieu des années 1980 apparaissent, des hommes pour la plupart, des groupes de danseurs d'un Rock-country dont ils prennent le nom : Rockabilly (ロカビリー). Ceux là durent plus longtemps et des clubs pratiquent encore le dimanche, costumes noirs, santiag' noires, coiffures Tenessee.
Le quartier n'héberge pas de salles de concert mais se soucie d'approfondir sa spécialisation. En 1978, Laforêt élève un grand bâtiment à Harajuku et stabilise un nouveau centre de la mode depuis son centre d'exposition et ses boutiques. En 2005, l'architecte Tadao Ando est chargé de remplacé des appartements d'Omotesando Street, construit à la mode Bauhaus (Dojunkai appartements) en 1927, par un long complexe de 130 magasins et 40 appartements, adoptant la forme d'une rue, la longeant, bordé d'arbres et de magasins de taille raisonable. Omotesando Hills ne compte que 6 étages dont aucun ne dépasse les arbres qui donnent sur la rue.
Mais c'est probablement à Kiddyland que je retournerai pour vous acheter des souvenirs !
En arrivant à Tokyo, ce qui m'était le plus difficile consistait moins à lire les panneaux (qui sont pour la plupart écrits en alphabet roman, ou bien tout simplement en anglais) que de deviner lequel il était bon de suivre. Lorsqu'un sentiment de déjà vu s'attachait à un mouvement de tête un peu brusque, il ne s'agissait pourtant pas d'un texte rédigé en français. D'autres blogueurs ont appelé ça du franponais. : les enseignes japonaises s'attachent régulièrement à imiter la grammaire et les sonorités françaises pour s'attirer un peu de prestige. La plupart du temps quelques coquilles, de nouveaux mots ou des usages poétiques de la langue. Je n'ai pas réussi à prendre de photo du sac à main "signifiant-signifié" que j'avais croisé à un carrefour mais il y a eu d'autres occasions depuis et j'en ferai un album, un bouquet à la manière non pas d'un fleuriste mais d'un "fleurage".
Une fois la barrière de la langue remise en place, tout est histoire d'expérience, de notes improbables en sortant d'un magasin. Par exemple, il est moins cher de se faire faire un massage (environ 20euros) que d'aller chez le coiffeur (environ 50euros). Il est aussi moins cher de s'acheter un café dans un des multiples distributeurs arc-en-ciel (environ 1euros) qu'une pomme (environ 2euros). En revanche, la mauvaise bouffe japonaise est très saine : un bol de riz avec de la viande dessus et parfois un oeuf (pour 3euros) est, à condition de ne pas se jeter sur le verre de thé infame servi avec, tout à fait suffisant pour se nourrir. Il y a plusieurs chaines de restaurant de ce type : Matsuya, Sukiya, Yoshinoya... Le seul risque étant de finir dans cet état là après un an :
Les prix du marché du fruit : 2euros pour une pomme, 4 euros pour 6 clémentines, 1euros 80 pour un oignon...
Un conte japonais raconte que : les plus gros poissons vivants au fond de l'océan, les pauvres n'ont une idée qu'assez trouble des heures auxquelles se couche puis se lève le soleil. Si on ajoute à ça le manque de rigueur, tout porte à croire qu'ils sont susceptibles de se lever de très bonne heure. Par manque d'optimisme les pêcheurs lancent leurs bateaux au beau milieu de la nuit ce qui leur permet également d'être de retour au port avant que le soleil ne se lève pour le monde entier.
Comme nous descendions du métro à 5h30 du matin, la nuit sur le bords du marché au poisson, retenait plusieurs semi-remorques et autres camionnettes, le long des files de scooters rouillés. Deux rues à droites puis tout droit, nous continuions à chercher la salle des enchères, là où les volumes de thons tokyoïtes s'évaluent, lorsque nous nous sommes retrouvés sur un parking dont les allées étaient étrangement pleines, de phares et de cris. Il n'y avait pas un poisson en vue mais, en flot continu, des barils rouillés sur roulettes, surmontés d'un volant, précédés d'un phare et suivis d'une petite plate-forme couverte de caisses de polystyrène. De jeunes japonais, insoucieux de tous les équipages, un bandeau sur les tempes, pilotaient sans efforts et très brusquement, dans des allées dont la taille était probablement inférieure à la largeur de leur bolide, dans le seul but d'effrayer les touristes. Une fois le parking traversé, une halle, qui se remplit chaque matin excepté le dimanche ; aux mêmes endroits je pouvais deviner les mêmes marchands. Dans un carré de peut-être 600m de large, traversé d'allées perpendiculaires les unes aux autres, s'alignaient d'innombrables stands. Quelqu'uns sont spécialisés, dans les huîtres et les poulpes ou bien dans les grosses carcasses de thons glacés découpés à la scie circulaire. Il y a aussi à vendre des brochettes de petits poissons, des oeufs de poissons et des dorades que les marchands voudraient montrer aux enfants. Les échoppes ressemblent à des magasins auxquels les murs auraient été retirés. Il y a souvent deux étages, le second étant une mezzanines où d'autres caisses, d'autres outils, en bois, sont stockés sous des couvertures. L'étage du bas est éclairé d'une lampe qui du plafond descend sur le visage des vendeurs, puis leurs pieds, au fond de leur bottes, sur la surface de la pellicule d'eau qui couvre le sol. De l'autre côté d'une rue, où le manège des bolides ne s'est pas interrompu, une halle vide et quelques groupes de deux ou trois hommes (la proportion de femmes augmente sous la halle, d'ailleurs le kanji qui signifie "bon marché" ou bien "paix" c'est une femme sous un toit : 安), un carnet à la main et des caisses à leurs pieds. D'après le dictionnaire, vente aux enchères existe bien en japonais, 競売, et à l'un des comptoirs on nous répond que c'est au bout du couloir à droite.
Au fond du couloir, la nuit était encore sombre, nous débouchions sur une autre rue, gagnée à son tour par la horde bruyante des rouleurs éternels de victimes. Du flot bleu, ces poissons d'or, ces poissons chantants, leurs phares font demi tour sans que le signal ne soit clair pour tous. Sous la halle sur la droite, la lumière électrique des carcasses colossales de thons congelés, la tête et la queue en moins. J'ai vu un homme tranchant sur un comptoir de couturière les os d'un de ces blocs de glaces. L'autre, en face clouait la tête à la proue du bolide, les quartiers de thons passait de la table à la planche, à l'aide d'un crochet. Bordant la masse sombre du fond de l'allée, tournant le dos aux plafonniers, rehaussé par le rouge des viandes, une subtile ligne d'agents de police nous barrait le passage. D'autres, étrangers ayant voulu participer aux ventes aux enchères, elles sont désormais fermées au public. L'espace dans lequel elles ajustent leur ligne de flottaison n'est compartimenté que par les courants qui le traversent et pour arrêter un banc minuscule d'imposteurs il fallait quelques agents persuadés de parler anglais. Après plusieurs tentatives, le froid nous gagne et nous regagnons la rive pour y trouver la fraicheur des premiers sushis (寿司). Mais les aubes sont navrantes et nous buvons un thé mauvais au comptoir d'une échoppe d'où on nous apporte quelques tranches de poissons crus.
Je viens tout juste d'emménager dans une Sakura House après avoir allègrement fui la famille d'accueil qui me permettait de manger bien au-dessus de ma faim tous les soirs. C'est une formule assez répandue au Japon (non pas de fuir son destin mais de mélanger japonais et anglais dans un même mot, étrangers et gens bizarre dans un même lieu), quoique sous des formes différentes selon les villes. Une maison de taille raisonnable est compartimentée en autant de chambres qu'il y a de pièces moins deux qui sont la cuisine et la salle de bain. Tout est inclus, draps, baguettes, balcons, eau chaude à volonté, télévision, machine à cuire le riz et petit temple en guise de backyard. Ce matin là, je me suis levé de bonne heure, c'était dimanche, j'ai rallumé le chauffage et je suis descendu prendre ma douche (ce qui consiste dans une salle de bain japonaise, à se tenir debout au milieu de la pièce en s'amusant à faire bouger les nuages de vapeur à l'aide de la pomme de douche). La plupart des gens que je rencontre à Tokyo n'ont pas beaucoup plus choisi leur destination plus que moi et sont pour la plupart victime de partenariats entre universités et autres bourses ou obligation de stages. De la même façon, aucun n'a choisi son acculturation. Le propriétaire de la maison, qui attendait ce matin là le réparateur de machine à laver (dont l'usage n'est pas limité, pour le plus grand bonheur du type qui a louer la chambre qui jouxte la cuisine), m'a fait remarquer que je prenais un petit déjeuner typiquement japonais (bol de riz, subtilement assaisonné à l'aide d'un oeuf cru, de quelques gouttes de sauce soja et escorté par une fidèle tasse de thé). J'ai remarqué que Ken (ou bien plus probablement Ben), l'américain se faisait un petit déjeuner typiquement anglais (bol de céréale, toast-confiture de groseille, tasse de thé, bol de céréales brièvement trempées dans du blanc lait de vache). Ce même Ken a jeté quelques minutes plus tard, un regard inquiet au petit déjeuner typiquement chinois qui oscillait entre le micro onde et le frigo (sac plastique, une dizaine de jiǎozi c'est à dire de raviolis à l'huile, du thé et ce qui pouvait bien donner du volume au sac plastique). Après une seconde douche (oui je rappelle que la chronologie est incorrecte) j'ai failli buter dans le dernier locataire, celui qui ne dort pas la nuit à cause de la machine à laver, ancien sous-marinier faisant un stage de business dans une fac tokyoïte et qui lui, en vrai soldat, ne prenait pas de petit déjeuner du tout.
Je suis sorti de la maison, j'ai pris le métro (et non plus le vélo) et nous sommes arrivés (quatre garçons joyeux de moins de trente ans, dont un a mis ses photos en ligne ici), dans l'est de Tokyo, dans le quartier de Ryōgoku (両国), entre le musée Edo-Tokyo (célèbre pour son architecture qui lui donne la surprenante forme d'un pont) et, oui, exactement, le Stade de Sumo Kokugikan (国技館). Il faisait beau, le vent se prenait dans des drapeaux pleins de couleurs, des sumos en yukata suivis par d'autres sumos poursuivis ceux là par de petites écolières comprises entre leurs jupes trop co
urtes, leurs sac à dos immenses et leurs éclats de rire. Il faut entrer ensuite, se faire faire un tatouage à l'encre invisible si on veut ressortir une fois pour profiter du café gratuit chez Mac Donald qu'offre les petits flyers distribués à l'intérieur. Il y a bêtement deux étages à l'intérieur du stade en forme de carré, d'un volume de 13.000 personnes, construit en 1985 sur, ou pas loin, de celui qui était là en 1909 mais pas utilisé depuis 1954. Au premier balcon, on s'assoit sur des sièges rouge-cinéma et la plupart des spectateurs hurlent, la bière au bord des lèvres, ou bien s'installent plus calmement derrière leur télé-objectif acheté la semaine précédente entre deux néons à Akihabra ("les champs de feuilles d'automne", moins littéralement : la ville lumière, un quartier central de Tokyo). Au parterre, c'est là que tout se passe, que la tension et le sel que les grands sumos jettent sur l'arène (ou "dohyo") sont bel et bien palpables. En arrivant de bonne heure (vers midi, sachant que la journée se termine aux alentours de 18h, précise, puisqu'on est au Japon) nous pensions voir jouer les gosses, encourager avec toute la ferveur de leurs mères au foyer. En fait, personne ne s'est ennuyé. Les matchs sont bien organisés par ordre croissant de catégories (six si je suis la page de wikipedia), une cérémonie en habits de couleur (kesho mawashi) marquant le passage d'un acte à l'autre, le dernier match étant celui du Yokozuna (seul dans sa catégorie, incontesté depuis 5ans, il est Mongole, porte un immense slip bleu qu'on appelle mawashi par respect et qu'il a obtenu à la suite d'une longue série de discussions serrées et autres examen) contre un des trente types de la catégorie des grands sumos. De toute façon il y a 15 jours de tournoi de sorte que tous les combattants ont l'occasion de rencontrer l'ensemble des membres de leur catégorie. Les combats durent entre 3 et 20 secondes, le temps qu'il faut pour que les 170 kilos de l'Ouest se ruent sur les 180 de l'Est et qu'ils lui fassent toucher le sol avec autre chose que ses pieds ou bien le balance de l'autre côté de la frontière de l'arène (matérialisée comme on peut s'en douter par de la toile de sac de riz). Plus la catégorie est associée à un important prestige, plus le nombre de coussins de ceux qui attendent sur le bord augmente, plus la quantité de sel jetée sur le sable, et aussitôt balayée, occupe une place importante. La foule hurle face au corps des sumos les plus populaires qui répondent, ou bien provoquent des cris et des nuages de flash, en se frappant les épaules et le torse assez énergiquement il faut reconnaitre. La prise Obélix qui consiste à faire faire de petits bons à l'adversaire en projetant son ventre sur le sien n'est en fait qu'assez peu pratiquée parce qu'elle oblige à perdre ses appuis au sol. La plupart du temps le mieux est encore d'éviter la charge du bourrin d'en face ou bien de se battre comme un homme jusqu'à devenir tout rouge et à se reprendre au dernier moment sur le bord de l'échec, y prendre tout son appui et se jeter de tout son poids sur les spectateurs les plus proches. Alors c'est un peu plus compliqué, il faut que les 6 ou 7 Parques commises d'office se réunissent au centre de l'arène pour décider qui touchera l'enveloppe de cash attribuée au vainqueur.
Puisque la mémoire de mon appareil photo est limitée vous n'aurez pas droit à la cérémonie de l'arc, à la dance du Yokozuna et à la taille incroyablement ridicule de "la portion de Sumo vendue entre 12h et 16h à la cafèt du sous-sol" pour 2euros. Les Sumos, eux, n'ont pas de petit déjeuner mais doivent s'enfiler leur Chanko Nabe (soupe au légumes et à la viande) et leur bol de riz servi sur une rivière de bière avant la sieste. A ce rythme là, jour après jour, on devient Sumo. Encore une histoire dont vous pourriez être le héros....
Dominique m'a appelé le matin pour me dire qu'il faisait beau et que nous avions le temps pour un tour en velo. Vers l'est depuis Ikebukuro, il n'y avait pas grand chose d'aventurier. Plutot, une blague dont la ligne de basse etait de ne pas prendre les grandes routes et puis se perdre vers l'est (encore et toujours la meme chose quoi). Il zigzaguait même de temps en temps. Il a dit que les bâtiments que les autres trouvaient laids habituellement lui plaisaient à lui. Alors on partait pour attraper du typique dans les arrières ruelles.
Bizarrement, le projet n'était pas du tout installé mais les photos cadrent assez bien avec lui. Les ruelles étroites, l'organisation débordante des maisons compilées, plastique et bois. L'ombre froide des ruelles. Des quartiers résidentiels entiers ne peuvent être vu que depuis l'arrière. Les rues serpentent. De quoi faire palir de rage tout ceux qui defendent qu'au Japon l'interieur est fermement separe de l'exterieur. L'intimite et le calme des demi jardins debordants sur la rue, un temple au coin d'une rue.
Le froid lent des dimanche après midi sur le campus déserté d'une université, une descente, la conviction d'une après midi perdue. Le calme du temple de Nezu. Depuis l'extérieur, depuis la rue il est aussi délaissé que le premier jardin public venu. A l'intérieur, le calme et le fouilli des allées et venues encombrées de vert, dallées de pierres, sous les arches rouges. Elles ne décorent pas, elles guident et sont justes trop courtes pour être confortables au premier passant. Il faut marcher dans un jardin dont le sens ne repose pas sur l'intérêt des visiteurs, sur quelque chose d'autre pourtant je suppose. Et finalement, en entrant dans un restaurant le sentiment d'en finir avec l'épopée. Des burgers du midi aux visages fermés des hâcheurs de poissons du soir il doit y avoir un voyage.
10h10-11h15. L'empereur du Japon (dont le titre, Tennō Heika 天皇陛下 sa majeste des cieux, cache le nom : Empereur Akihito, sur le trone depuis 1990) ne fait que deux apparitions depuis son balcon dans l'annee : le 23 decembre pour son anniversaire et le 2 janvier pour les voeux de nouvel an. Le palais imperial, dans le centre de Tokyo est ferme au public en dehors de ces deux occasions. Je m’attendais à buter dans plus de monde a la sortie du métro juste devant l’entrée du palais. Le ciel était bleu pour toute la journée et Sayaka, que j’ai rejoint en courant pour rattraper mon retard devant le palais, ne pouvait porter son manteau blanc que sur le bras. Il y avait des files pour guider les visiteurs et deux lignes de contrôles pour vérifier les sacs et fouiller le long de nos corps. A l’aéroport je n’avais pas été fouillé avec autant de précision. Mais l’allée était encore assez claire de monde et le courant de visiteurs, la foule ne commençaient à se faire sentir qu’en franchissant la porte ouverte ce jour là. Nous avons attendu un autre ami sans nous arrêter de marcher. Il etait possible de traverser le pont, le premier pont (Nijubashi), la photographie la plus prise au Japon, en bavardant au soleil. Elle a bu une coupe d’eau, et m’en a tendu une alors que je me faisais doubler par un japonais. J’ai demandé au garde si la famille impériale vivait dans le long et neuf bâtiment que nous voyions, elle a étendu la conversation et l’a arrêté lorsque Daan, Mickael et Clément nous ont rejoint. Nous nous sommes massé devant le centre du bâtiment, de la longueur d’un self. Après deux annonces, l’empereur a fait une des trois apparitions de la journée et Daan a suggéré qu’il devait aussi coupé des rubans de temps en temps. Il est apparu derrière une vitre et a lu quelques mots Avant que les drapeaux en papiers ne s’agitent de nouveau. Le plus simple était encore de suivre la foule en jetant un œil aux cartes qui nous guidaient vers les jardins. Les murs, très épais, de grosses pierres rondes polies sur le devant, étaient courts et ressemblaient à ceux du 18ème siècle, les fortifications bastionnées ou quelque chose. Nous sommes allés en montant et descendant légèrement. Il y avait quelques panneaux explicatifs. Un japonais nous a guidé un moment. Les allées goudronnées prennent le plus de place. Les jardins sont plats et l’herbe était grillée. Sur le haut des restes du donjon d’un certain shogun une japonaise nous a soudain abordé : (A) foreigners ? Where are you from ? (B) フランス. (A) Oh France is a country which relies on two main pillars : capitalism and socialism. It is between Russia ad England. (B) Yes yes…It was a long time ago. (A) Oh I am an evangelist, I would like to spend some time with you guys but I have a lunch with my boyfriend. I give you my phone number, here is my name.
11h30-14h30. Mickael devait aller travailler, il était en costume le matin. Daan a parlé d’un temple très controversé proche du palais, Yasukuni. Le temple est susceptible de recceuillir les noms des hommes morts sous l'uniforme de l'armee japonaise entre 1867 et 1951. Plusieurs criminels de guerre (dont 14 accuses de crime contre le pays lors du proces de Tokyo en 1946) y sont listes et les visites officielles sont toujours l'objet de tension avec la Coree et la Chine. L'empereur ne visite plus le temple depuis 1978.
Nous avons fini de serpenté dans le jardin, passé un pont remonté une rue, il y avait derrière le premier temple, au fond, tout au fond, un homme, un enfant et une autre personne en habit vert et blanc.
Ils se levaient et se déplaçaient devant un miroir, elle avait surement raison. Plus tard en repassant, ils étaient d e nouveau là. Plus loin, en passant le long d’un musée de la guerre il y avait un jardin, une retraite presque. Le soleil, dans les feuilles rouges et vertes, un pont sur la scène, de l’eau sur la scène, des poissons au fond de la scène. "Koi" pour le nom des poissons geants, rouges, noirs et jaunes qui peuplaient le fond. Des bâtiments fermés au public le long des feuillages. Pas de l’herbe, de la mousse, et des bancs pour s’asseoir devant, au moins une dizaine. On a supposé que les poubelles publiques devaient aussi être rassemblées en un seul et même endroit quelque part dans Tokyo. Nous sommes partis chercher à manger et puis finalement revenu au même endroit.
...15h30. Dans les jardins du palais, sur l’herbe courte, en épines de pin, étendue en tapis, l’après midi s’est étendue sur sa fin, refroidie et nous sommes partis un peu avant 16h. Nous pouvions remarqué des constantes dans nos sujets, rien n’était euphorique et il n’y avait pas de point entre chaque départ.
…19h Nous sommes arrivés vers 16h au Tokyo Dome et nous devions y rencontrer Julian précisément à cette heure là. Il venait avec une fille et deux amis de cette fille. Les gigantesques montagnes russes étaient fermées. Il y avait beaucoup de lumières et quelques courtes artères principales. Un village artificiel, des arbres illumés, des enfants, un bateau illuminé, des attractions très hautes et dispersées entre les allées, plusieurs répliques à taille réduite pour les enfants. Ils criaient souvent plus fort. Daan pestait contre les lumières, nous avons suivi les panneaux qui nous éloignaient du centre et indiquaient un cafe. Nous sommes rentrés de nouveau dans le parc pour un tour d’observation et nous avons atteint sans encombres le 43ème étage de l’hôtel du parc, l'ascenceur montait bien au dessus des effrayantes chutes libres mecaniques. Il y avait les même attractions, au loin la Tokyo Tower, dans une grande cour intérieure, une galerie de magasins et de restaurants, dont un KFC et Bubba Gump.
En ressortant, du parc, en quittant Clément devant la station, une japonaise d’une trentaine d’années, "hôtesse dans un bar" a cité plus tard Daan, nous a proposé de faire du shopping ensemble pendant trente minutes. Nous n’avons rien compris, l’un de nous a du formuler que non et elle est repartie sur le trottoir. J’ai pensé après que c’était idiot de l’avoir laissé partir.
Je ne fais que prendre des notes et je n'ai pas le temps aujourd'hui de traduire mais d'ici une semaine je ne penserai plus a les poster. C'est la premiere fois que je lis un film avant de le voir, ou du moins je n'en ai vu que quelques extraits depuis une salle de classe. J'ajoute a la photo et aux quelques extraits du script (originellement en francais mais je n'est pu trouve que la version anglaise sur le net) que je le regarderai bientot, que je crois avoir trouve ce que je voudrais faire des souvenirs que j'accumule dans les rues de Tokyo.
Voix Off : "He wrote: I'm just back from Hokkaido, the Northern Island. Rich and hurried Japanese take the plane, others take the ferry: waiting, immobility, snatches of sleep. Curiously all of that makes me think of a past or future war: night trains, air raids, fallout shelters, small fragments of war enshrined in everyday life. He liked the fragility of those moments suspended in time. Those memories whose only function had been to leave behind nothing but memories. He wrote: I've been round the world several times and now only banality still interests me. On this trip I've tracked it with the relentlessness of a bounty hunter. At dawn we'll be in Tokyo. "
"He wrote: Tokyo is a city crisscrossed by trains, tied together with electric wire she shows her veins. They say that television makes her people illiterate; as for me, I've never seen so many people reading in the streets. Perhaps they read only in the street, or perhaps they just pretend to read—these yellow men. I make my appointments at Kinokuniya, the big bookshop in Shinjuku. The graphic genius that allowed the Japanese to invent CinemaScope ten centuries before the movies compensates a little for the sad fate of the comic strip heroines, victims of heartless story writers and of castrating censorship. Sometimes they escape, and you find them again on the walls. The entire city is a comic strip; it's Planet Manga. How can one fail to recognize the statuary that goes from plasticized baroque to Stalin central? And the giant faces with eyes that weigh down on the comic book readers, pictures bigger than people, voyeurizing the voyeurs.
At nightfall the megalopolis breaks down into villages, with its country cemeteries in the shadow of banks, with its stations and temples. Each district of Tokyo once again becomes a tidy ingenuous little town, nestling amongst the skyscrapers. "
"The code is the message."
"My personal problem is more specific: how to film the ladies of Bissau? Apparently, the magical function of the eye was working against me there. It was in the marketplaces of Bissau and Cape Verde that I could stare at them again with equality: I see her, she saw me, she knows that I see her, she drops me her glance, but just at an angle where it is still possible to act as though it was not addressed to me, and at the end the real glance, straightforward, that lasted a twenty-fourth of a second, the length of a film frame. "
"He wrote me: even in the stalls where they sell electronic spare parts—that some hipsters use for jewelry—there is in the score that is Tokyo a particular staff, whose rarity in Europe condemns me to a real acoustic exile. I mean the music of video games. They are fitted into tables. You can drink, you can lunch, and go on playing. They open onto the street. By listening to them you can play from memory. "
"Video games are the first stage in a plan for machines to help the human race, the only plan that offers a future for intelligence. For the moment, the inseparable philosophy of our time is contained in the Pac-Man. I didn't know when I was sacrificing all my hundred yen coins to him that he was going to conquer the world. Perhaps because he is the most perfect graphic metaphor of man's fate. He puts into true perspective the balance of power between the individual and the environment. And he tells us soberly that though there may be honor in carrying out the greatest number of victorious attacks, it always comes a cropper. "
"For also in Japan the year of the dog is beginning. Temples are filled with visitors who come to toss down their coins and to pray—Japanese style—a prayer which slips into life without interrupting it.
Brooding at the end of the world on my island of Sal in the company of my prancing dogs I remember that month of January in Tokyo, or rather I remember the images I filmed of the month of January in Tokyo. They have substituted themselves for my memory. They are my memory. I wonder how people remember things who don't film, don't photograph, don't tape. How has mankind managed to remember? I know: it wrote the Bible. The new Bible will be an eternal magnetic tape of a time that will have to reread itself constantly just to know it existed. "
"He writes me from Japan. He writes me from Africa. He writes that he can now summon up the look on the face of the market lady of Praia that had lasted only the length of a film frame.
Will there be a last letter?"
>> le film complet est accessible via google (en francais cette fois-ci, avec des sous titre espagnols).
Il y a quelques week end nous sommes allé nous balader à Kamakura, à une quarantaine de minutes au sud de Tokyo. Il avait été prévu que le voyage soit un voyage tout à fait touristique. C’est à dire qu’il s’agissait de suivre à la lettre les indications du guide. Nous avions même un guide chacun (deux guides au total). Nous sommes descendu à la station Nord de Kamakura. Une simple barrière sépare la route de la voie de chemin de fer et, depuis cette route qui mène à la ville il est facile d’accéder à plusieurs temples zen.
Les temples zens nous les avons trouvé sur le chemin, ils nous attendaient impatiemment. Après ça il y a eu un bol de soba dans un restaurant assez calme, puis nous avons feuilleté quelques minutes nôtres guide. Ce qui guide les flots de touristes qui se déversent chaque week end sur Kamakura c’est habituellement le grand Buddha qui, de toute évidence, n’est pas difficile à trouver… « Depuis Hase-dera, tournez à gauche au moment de croiser la rue principale et suivez les foules vers le nord sur quelques centaines de mètres pour trouver le Daibutsu (ouvert tous les jours de 07h00 à 17h30, 200yens). Après toute la réclame dont il a fait l’objet, le Grand Buddha peut paraître un peu décevant, mais au fur et à mesure que vous vous approchez et que son visage, serein et plutôt austère, se précise, la magie commence à prendre. Il est assis sur un piédestal de pierre, une imposante silhouette perdue dans ses méditations, la tête légèrement penchée en avant, le soleil, la pluie et le vent ont déposé un voile gris-vert sur son visage et ses vêtements. La statue, d’une hauteur de 11mètres représente Amida Nyorai, le future Buddha, commanditée par Minamoto Yoritomo devait pouvoir rivaliser avec le Buddha de Nara. Achevée en 1252, la statue est faite de plaques de bronze vissées les unes aux autres sur une structure creuse (pour 20yens vous pouvez monter à l’intérieur), et de toute évidence, dans le passé, le bronze était lui même couvert de fine plaque d’or. »
Seulement à 17h30, en sortant du restaurant, il faisait nuit et le propriétaire d’une petite boutique de vêtement c’est bien marré quand on lui a demandé la route pour aller jusqu’au Buddha… Un petit goût amère !
Le plus important est donc contenu dans l'album photo que j'avais essayé de rendre diverstissant mais pas moyen d'utiliser tous les outils que le blog propose en théorie.
Scribouilleur-sociologue, apprenti-cinephile, actuellement a l'est
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